Sortir de la normale pour vivre dans la guerre...

Prologue:

A toute règle, il existe des infractions; à toute norme, il existe des exceptions. L'on parle généralement par moyenne, comme si tout pouvait être normalisé, standardisé. Les historiens et les conteurs suivent souvent cette habitude...
Mais moi, je vais vous parler d'une anormalité. D'une chose sortant un peu de l'ordinaire. Pas exceptionnelle et si extraordinaire que cela, non plus. Je vais juste vous dire l'une de ses choses qui ne sont pas dans la moyenne, voire qui s'en éloignent totalement. Sans pour autant tomber dans le fabuleux.

On dit que les Louves sont moches, sinon hideuses. On dit qu'elles ne s'occupent que de leur foyer, courant après les mâles reproducteurs. On dit qu'elles ne s'impliquent pas dans les guerres et la politique des Loups.
Voilà où j'interviens. Je vais vous présenter une des exceptions à ces habitudes. Juste histoire de vous montrer que tout n'est pas uniforme. Et pour que vous sachiez à quoi vous en tenir...

L'origine, la légende:

Voici une trentaine d'années, naquit l'une des portées de l'unique Louve d'une Meute esseulée dans ses montagnes. Cette portée se démarqua parce qu'elle ne comportait que des femelles: quinze jeunes Louves venaient de naître, au sein d'une meute de seulement cent cinquante Loups seulement ! Une proportion peut-être jamais égalée...
Imaginez donc la tête des mâles ! Déjà tyrannisés par l'unique Louve de leur Meute, les voilà avec quinze nouvelles dictatrices en puissance sur les bras !
Alors, ils firent ce qu'aucun autre Loup, à leur connaissance, n'avait jamais fait: quelques années après cette portée étrange, ils se révoltèrent contre la femelle, dont la jeune portée était encore vulnérable. La Louve fut massacrée et taillée en pièce par les plus puissants mâles de la Meute, après que ces derniers aient envoyé les plus faibles au casse-pipes, tombant sous les coups de la femelle les uns après les autres, l'épuisant peu à peu.
Cela fait, il conservèrent une unique femelle, pour la survie de leur Meute. Les quatorze autres furent abandonnées dans une vallée voisine, vouées à la mort...

Pourtant, les quatorze femelles survécurent. Malgré leur jeunesse, malgré les habitudes concurrentielles du peuple Loup, elles s'unirent pour combattre et chasser pour survivre. Qu'est-ce qui avait pu motiver ainsi ces si jeunes êtres ? L'instinct, peut-être ? La seule volonté de survie, bien qu'elles fussent abandonnées à seulement cinq ans ? Mais elles ne le surent jamais. Quoi qu'il en soit, leur mémoire d'enfant avait conservé le souvenir du massacre de leur mère et de leur abandon...le goût de la vengeance avait rapidement jaillit, motivant davantage encore ces jeunes femelles: peut être, en fait, est-ce cela qui les avait convaincues de survivre ?
Pendant dix ans, elles restèrent cachées dans la vallée où elles avaient été abandonnées, se faisant discrètes, se faisant oublier de leur Meute et du monde entier, décidées à se préparer suffisamment pour obtenir leur revanche. Ce fut l'enseignement de la patience, pour les quatorze sœurs.

Enfin, à l'âge de quinze ans, elles sortirent de leur trou. Elles n'étaient pas des femelles ordinaires: toutes étaient d'une beauté sans égale, tout aussi sauvage que froide et digne. Des femelles désirables, sans aucun doute. De quoi venait cette beauté ? Peut-être de ce long isolement loin des mâles et de femelles plus âgées, tout comme elles avaient apprit la vengeance et la patience.
Fortes, aussi: elles ne formaient pas une Meute complète à elles seules, et elles partageaient toutes les tâches quelles qu'elles soient, n'ayant aucun mâle à leur disposition. La force naturellement démesurée des Louves se voyait donc renforcée par les épreuves de force quotidiennes.
L'esprit vif, entraîné à toutes les tactiques de chasse: on ne survit pas dix ans esseulé sans savoir comment se comporter.
Bref, de vraies tueuses...

Car c'est ce qu'elles étaient, par nature et par elles-mêmes. Décidées à enfin obtenir ce qu'elles recherchaient depuis leur abandon, se sentant suffisamment fortes, elles assaillirent leur Meute d'origine. Leur sœur retenue comme procréatrice de la Meute avait cultivé les mêmes désirs, secrètement, bien qu'elle n'ait pas évolué de la même façon, prisonnière de ces mâles qui avaient décidé de renverser l'ordre hiérarchique de la Meute, se joignit aussitôt à elles.
A mains nues, les quinze jeunes Louves massacrèrent le restant de la Meute, sans la moindre once de pitié, en une sanglante boucherie, n'usant d'ailleurs pas que des mains: nombres de nez furent cassés d'un coup de front, nombre de jambes furent cassées d'un coup de pied, nombre de poitrines furent enfoncées par des coups de coude, nombre de gorges furent broyées entre les doigts...ou arrachées à coups de crocs...
Seules, installées dans leur montagne, elles décidèrent alors faire subir leur loi aux mâles qui passeraient à leur portée: comme dans certaines légendes de femmes-guerrières, elles se consacrèrent à créer une société entièrement composée de Louves, ne quittant leur territoire que pour capturer des partenaires, qui finissaient en pièces; les Loups qui naissaient étaient impitoyablement tués, ou conservés pour de basses tâches s'ils étaient suffisamment faibles et malingres.

L'entrée sur la scène, la révélation au monde:

Mais l'une des quinze sœurs, la dernière-née en fait, refusa cette vie. Non pas parce qu'elle la trouvait mauvaise; mais sa rancœur envers la Meute lui faisait exécrer le territoire même où elles s'étaient installées. Elle était aussi celle qui avait le plus durement ressentit la mort de leur mère, et la première à avoir évoqué la vengeance et à avoir imaginer comment l'exécuter. La plus violente de toute la portée; l'une des plus belles, et l'une des plus intelligentes -bien que son intelligence ne soit que celle de la guerre et, elle devait s'en apercevoir ensuite, du gouvernement.
Elle quitta donc la Meute de femelles, très rapidement, alors que ses sœurs partaient pour leur première "chasse aux mâles".

Aux instincts de maternité de la Louve, celle-ci avait substitué le goût du pouvoir, tout simplement. Sans doute l'absence de sa mère, la ressemblance avec ses sœurs, et le "peu de cas" que les mâles de leur Meute avaient fait d'elle en l'abandonnant, s'étaient condensés en un besoin irrépressible de reconnaissance et de gloire...
"Siana"...la Louve qui ne s'intéressait qu'au sang et à la puissance. Voilà ce qu'elle voulait, ELLE: commander ! Diriger des armées, les mener à la mort ou à la victoire d'un seul ordre ! Diriger les vies, et se voir obéit au doigt et à l’œil ! Obtenir et conserver les honneurs, la reconnaissance ! Se sentir toute-puissante !
Voilà ce qu'elle voulait, tout ce qu'elle désirait: non pas vivre, recluse dans les territoires Loups, pour procréer sans cesse; mais, au lieu d'enfanter, apporter la mort, être en première ligne, amener la victoire. Car son rêve, son souhait fou, était devenu celui de commander à tout le Peuple Loup ! Elle se voyait, cette Louve, la chef suprême de tout un Empire Loup, auréolée de la gloire du commandement et des victoires éclatantes. Menant son peuple à la conquête du monde !
C'était donc son souhait: fédérer les Loups sous une seule bannière -la sienne, évidemment- pour qu'au lieu de s’entretuer, ils conquièrent le monde...après, advienne que pourra, car son nom serait dans les Annales pour toujours ! Elle serait devenue la première maîtresse de tous les êtres connus, à la tête de hordes hurlantes et terrifiante. Elle voyait déjà la légende traverser les âges, transmise par les livres ou par les contes oraux.
Elle y croyait, avec ferveur. Son seul but, celui sur lequel elle se concentrait, c'était bien celui-là. Elle le croyait réalisable: liguer tous les Loups en une seule armée pourrait, elle en était persuadée, les mener à une victoire totale...

Et elle avait débuté ainsi son chemin. Le premier objectif fut rapidement remplit: détrôner un de ses imbéciles de Dominants, pour prendre la tête d'une Meute. Puis, monter une armée... Elle n'avait jusque-là que le don de la guerre et du combat: elle se découvrit capable de gouverner efficacement, non par elle-même, mais en sachant qui nommer: elle remplaça les hautes castes de la Meute en grande partie, ne choisissant les individus que sur des critères de compétence et de fidélité -à son égard, bien sûr. Les bouseux ainsi montés en rang lui vouait une fidélité sans faille; et les nobles Loups restés en place, bien que jaloux de ces nouveaux dirigeants, faisaient la course entre eux, cherchant à récupérer leur influence perdue...de quoi mettre les plus intelligents, les gagnants, aux postes-clefs, pour développer la Meute à tous points de vue.

Sa légende était en marche. Restait à arriver au bout du chemin, et Siana, elle, se voyait déjà parcourir tout ce chemin en courant, véritable Égérie de la Guerre pour tous les Loups.
Une Égérie au corps fin et puissant, haute de plus de deux mètres, avec une longue chevelure d'un blond presque blanc, une peau d'un pâle rose, et de grands yeux d'un vert émeraude...le tout, recouvert d'une armure noire, épée et bouclier en main ! Oui, c'était ce qu'elle voulait devenir...qu'ils tremblent, tous: Loups, Gobelyns, Doronoans...et tout les autres, aussi ! Siana arrivait...

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Spoiler:

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